Critique de la notion de protection

Compte-rendu Brocéliande juillet 2010


Trame de la présentation orale qui a servi ensuite à une discussion collective

  • Explication des notions de droit spécifique et de droit commun
  • La protection est un droit spécifique
  • Parallèle avec protection des femmes
  • Si les mineurs avaient accès au droit commun, ils pourraient mieux se défendre
  • La force physique est un faux problème, voir analyse de Delphy : la force dans les rapports interindividuels est réglée par les structures sociales ; ce n’est pas parce que les enfants sont faibles qu’il faut les protéger, c’est parce qu’ils sont dans une classe sociale inférieure qu’ils sont vulnérables et donc ensuite on veut les protéger. La logique serait plutôt de faire en sorte qu’ils ne soient plus dans une classe sociale inférieure.
  • Création de l’incapacité des enfants à se défendre, de part aussi leur éducation, l’intériorisation de leur faiblesse, et les outils qu’on ne leur donne pas ; on les construit faible, soumis, puis on les protège.
  • Exemple des enfants travailleurs du Nicaragua : contre l’interdiction faites aux enfants de travailler, ils revendiquent l’accès libre à l’éducation et critiquent l'école obligatoire
  • La figure du "pédophile" dont il faut protéger les enfants a ravagé toute possibilité de réflexion sur l'émancipation des enfants dans les 80’
  • Parallèle avec le "violeur de femmes"
  • A noter : les plus grandes violences se font dans la famille, par un proche (famille, amis) ; cette violence est structurelle à l’infériorisation des enfants et des femmes au profit des hommes, renforcée dans la famille par le droit spécifique.
  • La notion d’aide, qui existe déjà, pourrait remplacer la notion de protection ; c’est une valeur sociale reconnue d’aider ceux qui en ont besoin – cf. les handicapés ponctuels : une personne qui se casse la jambe n'a pas besoin d’être "catégorisée" pour qu’on lui apporte l’aide dont elle a besoin

Points soulevés lors de la discussion

  • Les lois changent quand les moeurs changent, et vice-versa ; il s’agit de changer les lois en tant qu’elles font partie de ce qui structure notre société, non par déférence. Je peux très bien lutter pour faire accéder une catégorie dominée au droit commun d’un coté, et lutter contre l’état de droit de l’autre coté, ça ne me pose pas de problème.
  • La lutte contre la fessée a pris le chemin du droit spécifique, quand il suffisait de revendiquer l’accès au droit commun. En réalité, cette dernière stratégie aurait été plus radicale, car elle nécessitait une réflexion sur la catégorisation sociale des mineurs. En luttant pour un droit spécifique, rien de structurel n’est remis en question, et donc rien de ce qui fonde la possibilité d’une violence sur les mineur ; c’est dommage.

Références

  • “La dérogation au droit commun comme fondement de la sphère privée”, chapitre de “Penser le genre”, tome 2 de “L’ennemi principal”, recueil d’articles de Christine Delphy. Ce chapitre a été édité en brochure par les éditions de la tomate sous le titre “Les femmes et les enfants après”. Il est aussi disponible ici

  • “Sur la prostitution des enfants”, chapitre de “Le prisme de la prostitution” de Gail Pheterson ; disponible en brochure et ici

  • lecture conseillée au cours de la discussion : "La Grande arnaque " de Paola Tablet