Avoir des enfants ou pas
Compte rendu réunion non mixte femmes jeudi 24 août 2006 en Aveyron lors des rencontres AMP
Thème de départ : Avoir des enfants ou pas", thème d’une réunion précédente sans parents un jour avant.
Non, rien de rien, non, je ne regrette rien
Quelqu’une s’est dit que si elle ne faisait pas d’enfant, elle en concevrait de toute façon des regrets en atteignant l’âge de 50 ans, construction sociale oblige. De s’être dit cela lui permet de ne pas se construire des justifications qui s’écrouleront à la première crise de ménopause. De le savoir l’a plutôt allégée.
Nous avons donc cherché à analyser d’où vient ce sentiment d’obligation de procréer : Nous sommes programmées socialement et culturellement depuis la naissance pour devenir des mères (Jeux, imagerie, littérature, vision des adultes accompagnant). La pression sociale accompagne ce formatage et nous nous retrouvons vite obligées, lorsque nous arrivons en conscience effectivement à prendre des décisions pour notre vie, de décider non pas d’avoir des enfants, mais de ne pas en avoir. Cela pose des problèmes énormes, comme par exemple de se retrouver avec des enfants sans l’avoir réellement voulu et de ne pas pouvoir/vouloir s’en occuper réellement, ou encore, justement, les regrets de ne pas avoir eu des enfants, ou encore les conceptions d’enfant tardives, par peur des regrets…
La bienheureuse légitimité des Mères
Les femmes étant pressenties pour faire des enfants, il leur arrive de choses incroyables. Nous avons crû remarquer nombre de nos copines qui se sont métamorphosées en accueillant un enfant. Elles sont devenues des Mères. Cela n’a rien d’incroyable, puisque le seul moment où les femmes sont reconnues absolument légitimes dans leur existence et non remplaçables est ce moment de la maternité. Elles y acquièrent leur véritable place dans la société, la seule en fait qui leur soit dévolues. Ce qui entraîne d’ailleurs souvent des abus de pouvoir sur les enfants ou sur le père.
Lorsque des femmes se sentent heureuses d’être des mères et de vivre avec des enfants, il ne s’agit pas de les stigmatiser pour autant…. Mais le but de l’histoire est quand même que les êtres humains de toutes espèces aient la possibilité de décider, sans pression aucune, de procréer ou non. Une de nous a posé que tout le monde n’est pas fait pour avoir des enfants. A l’échelle d’une population, tout le monde n’est pas obligé de faire des enfants pour la « survie de l’espèce », au contraire, puisque cela pose le problème de la surpopulation.
Séparation corps/mental
Questionnement sur la nature physique ou mentale de l’envie d’avoir des enfants.
Quelqu’une a trouvé que la décision de ne pas avoir d’enfant était une démarche plutôt intellectuelle. Le besoin d’enfantement est un processus biologique et physique qui pouvait bien finir par s’imposer, comme peuvent s’imposer les maladies.
Mais d’autres ont souligné l’importance du conditionnement social qui nous pousse à ressentir le besoin d’être mère.
Plusieurs interventions ont accompagné l’idée que le corps ne s’exprimait pas séparément du mental, mais que le mental transformait aussi nos corps. Que la séparation corps/mental est fortement nuisible justement à la reconnaissance des problèmes que nous avons et qui ne sont pas exprimés par notre mental.
Les témoignages sur l’écoute de son propre corps et du lien entre la fertilité et l’envie d’enfanter nous ont amené à l’idée que les êtres humains, hommes et femmes, ne connaissent pas leur corps. En particulier, les femmes ne ressentent pas/ ne reconnaissent pas les signes de leur fertilité et de leur grossesse.
Lien avec les questions anti-industrielle
["les luttes anti-industrielles" étaient l'autre pôle des rencontres AMP en Aveyron]
Les femmes occidentales ont besoin de la preuve de leur grossesse par le test, qui donne une légitimité scientifique, plutôt que de croire aux signes, pourtant assez explicites, de leur grossesse (gonflement des seins, etc.)
Mais certaines femmes présentes ont témoigné avoir ressenti qu’elles étaient tombées enceintes quand elles en avaient eu envie, et qu’elles s’étaient senties prêtes. D’autres n’étaient pas convaincues.
Nous avons aussi reconnu que les hommes sont tout autant conditionnés que les femmes, surtout au niveau de l’expression de leurs sentiments. Ils n’ont pas le droit de pleurer, de se préoccuper de leurs sensations et sentiments etc..
Notre bonne Nature féminine
Une méfiance envers le « ressenti, la nature, les sentiments », tout ce qui touche à une prétendue nature typiquement féminine, a été exprimée, ainsi que la tentation, au sein des groupes de discussion de femmes, de renforcer cette imagerie opposée à la bienheureuse pseudo rationalité masculine, en arguant ainsi d’un pouvoir féminin :
Dans les mouvements féministes, on entrevoit plusieurs tendances dont justement celle qui consiste à vouloir rester dans cet espace traditionnel féminin (de la nature), à le renforcer, en en faisant l’espace de notre force. Une autre tendance serait de vouloir être et faire « comme les hommes », et encore d’autres à investir d’autres espaces, sans pour autant vouloir reprendre le modèle masculin, ni se fondre dans l’imagerie restreinte de « l’éternel féminin ».
Retrouver le contact avec son être intime ne signifie pas dire adieu à toute forme de rationalité, au contraire.
De la vérité concernant l’incroyable épanouissement des femmes dans la maternité
Plusieurs femmes ont témoigné des difficultés parfois très grandes d’élever un enfant.
Certaines ont raconté ne pas arriver à être des mères comme elles aimeraient être (comme on attendrait d’elles). Ou encore d’avoir des vrais problèmes relationnels avec leur enfant, ne pas être en phase avec ellui, ne pas arriver à se comprendre, ou encore qui vivent mal de devoir être sans cesse disponibles pour leur enfant, d’être l’ « objet » de leur enfant. D’autres ont exprimé leur jalousie vis-à-vis d’autres femmes jeunes qui n’ont pas cette obligation de s’occuper d’un enfant, et sont libres de leur vie et de leurs activités.
Plusieurs témoignent de leur grande difficulté de vivre seule avec des enfants. Les « pétages de plombs » sont alors fréquents.
De façon assez massive, l’idée qu’un collectif doive épauler les parents dans le maternage a été développée. De même, des non-parentes ont expliqué qu’elles ne se voyaient pas avoir un enfant ailleurs que dans un collectif.
Collectif, mon amour
Les enfants ont tout intérêt à être entourés de plusieurs adultes référents, amis ou parents au sens large.
Nous avons évoqué les cas où les gentes sont dans des collectifs, ou aspirent, ou s’apprêtent à y être : Ce n’est pas la même chose d’arriver dans un collectif pour qui la place des enfants n’est pas forcément claire, que dans un collectif qui a pensé cette place inhérente d’avec celle des adultes. De plus, tous les collectifs sont différents et abordent cette question ainsi que le quotidien de manière singulière, qui n’est pas forcément l’idéal des parents arrivant. Nous avons évoqué la nécessité de parler, au sein du collectif, du désir d’enfanter et du projet de vie avec un ou des enfants. On ne conçoit pas, si donc ces conditions sont réunies, l’enfant comme la propriété privée de ses géniteurs.
Puis, nous avons abordé la question de la sexualité enfantine et adulte d’une façon intime que nous (qui faisons ce compte rendu) n’avons pas envie de rapporter ici.