La grève des écoliers - Un épisode de la guerre sociale en angleterre (1911) - extrait

Danièle Rancière - Editions de la guerre sociale septembre 2009

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La grève fut pour les enfants un moyen d’exprimer leurs sentiments, elle fut surtout une sorte de fête. Les photos montrent des visages heureux et sou­riants, et les journaux ont beau faire preuve de prévention, les compte rendus des faits donnent une description des grévistes qui laisse percevoir cet aspect de « fête de la liberté ».

« À Sunderland, les enfants, tous nus pieds, portaient une énorme branche d’arbre », dont l’Illustrated Chronicle semble penser qu’elle avait une signifi­cation mystique. Les écoliers de Pollock, Glasgow, défilèrent aussi dans les rues avec des branches d’arbre « en frappant sur des bidons de fer-blanc » (Greenock Telegraph, 15 septembre). De même à Airdrie, les enfants avaient apporté dans les rues par centaines des sifflets et des boîtes de conserve sur lesquelles ils frappaient et, à Southampton, ils formèrent des orchestres avec des harmonicas et une énorme baignoire en métal qui leur servait d’instrument à percussion. À Manchester : « un grand nombre d’enfants se rassemblèrent au voisi­nage de la gare d’Oldham Road, et ils battirent la retraite sur les palissades de bois et les panneaux publicitaires » (The Herald, 16 septembre). Dans les quartiers industriels, les enfants écrivaient leurs revendications à la craie sur la chaussée ou bien distribuaient des tracts, surtout ils parcou­raient les rues en chantant au son des sifflets et des harmonicas « une, deux, les garçons sont en marche » et « viens-t’en et suis-moi », le chant de grève le plus populaire dans tout le pays. Les grèves ne furent pas toutes violentes. À Hartle­pool, les garçons marchèrent le long de la plage et pique-niquèrent. Ailleurs, ils allèrent à la rivière nager, parfois ils s’asseyaient simplement en rond pour discuter, ils jouaient aux petits soldats et défilaient en chantant des chants patriotiques, à Northampton les grévistes allèrent cueillir des mûres, partout ils s’amusèrent à composer des chansons, paroles et musiques. Ils montrèrent de l’imagination et de l’originalité, témoignant que « malgré l’étouffoir scolaire, leurs esprits n’avaient pas été détruits par la grise monotonie des salles de classe et contenaient encore des idées comme la boîte de peinture des couleurs ».

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