Débat sur la parentalité
Compte-rendu réunion rencontre AMP 2006, Aveyron
L'objectif est de questionner le rôle de parent dans sa dimension de relai de l'état et de socialisation des enfants (voir l'exploitation de la condition parentale texte de Christiane Rochefort), de voir comment ce rôle est enraciné en nous, quelles sont les pistes pour en sortir et quelles sont les limites à cette déconstruction ?
Etre parent, est-ce être dans un rôle ou être vivant, vivre avec son enfant? Est-on propriétaire de son enfant, référent légal, génétique, d'autorité, etc.? Le terme de parent n'est pas entendu seulement au sens strict de père ou mère mais peut s'étendre à toute personne impliqué affectivement auprès de cet enfant.
Avoir des projets pour ses enfants ou pas?
Volonté parentale de maîtriser l'environnement de ses enfants, soit par le biais de la famille nucléaire, soit par un collectif de confiance.
Discussion sur l'influence possible des parents envers leurs enfants. Une femme, qui est grand-mère, dit qu'on ne peut pas choisir pour ses enfants, on ne peut que les aimer pendant les premières années de sa vie puis les accompagner dans leur choix. D'autres personnes expriment leur ressenti que l'environnement de l'enfant l'influence beaucoup plus que ses parents. Cela est du au fait que les personnes d'un même milieu social vivent généralement dans les mêmes quartiers, mais c'est également une histoire de génération, nous avons davantage la culture de notre génération que celle de nos parents.
Dans la mesure où nous ne nous sentons pas propriétaire de notre enfant, comment pouvons nous avoir un projet politique pour lui ? Pouvons nous, est-il souhaitable d'interdire certaines choses à nos enfants (exemple : regarder la télé, manger au macdo, etc.)?
Intervenir dans des relations parents/enfants ? ou début de débat sur la non exclusivité parentale
Envie de remise en cause du rapport de domination adulte/enfant et de l'exclusivité parentale. Les parents présents expriment qu'il est très dur de se voir remis en question en tant que parent devant son enfant. La question "est-il souhaitable, et si oui comment, d'intervenir dans un moment critique d'une relation parent/enfant?" apparaît. Nous nous demandons pourquoi cela est si dur. Nous arrivons à dire que cela dépend de la façon dont cela est fait. Les parents ne supportent pas les personnes qui viennent leur expliquer comment il faut faire, en les culpabilisant au passage et sont plutôt en demande de soutien. Elles ne sont jamais fières d'elles quand elles ont le sentiment de ne pas respecter leur enfant et auraient plutôt besoin que l'on s'occupe d'elle plutôt qu'on les culpabilise tout en les laissant seules face à elle-même et à leur enfant. Nous avons alors établi-es la différence entre "intervenir dans une relation" (ce qui est presque toujours désagréable) et établir une "médiation" (ce qui suppose d'être à l'écoute et de permettre un dialogue).
Une des envies fortes exprimées est l'envie de la constitution de collectifs de confiance qui se préoccupent de ce que c'est que vivre avec des enfants et qui essaient de construire un autre mode de relation et de prise en charge collective des enfants. Un certain nombre de personnes présentes veulent avoir des enfants au sein de collectif de cette sorte, refusant d'en avoir seuls. Arrêtons de faire des enfants seul-es !
Ce serait intéressant pour les parents, qui se sentent souvent seuls et débordés, pour les non-parents, qui se sentent exclus de cette relation, et pour les parents, qui ont peu de modèles dans leur entourage. Néanmoins, un collectif peut être aussi oppressant qu'une famille nucléaire.
Remise en cause importante du maternage, du fait que la mère soit le principal partenaire de l'enfant. Est-ce que le fait que l'enfant est souvent en demande de sa mère est dû au renouveau de la mode du maternage ? Ces problèmes se posent surtout au moment critique pour l'enfant, quand il est en demande affective forte et qu'il veut être entouré, porté par une personne de confiance, qui est souvent de fait un de ses parents. L'enfant demande prioritairement la personne qui s'occupe le plus de lui depuis quelques jours. L'idée du collectif est donc que l'enfant ait plusieurs personnes de confiance dans son entourage qui s'occupent de lui.
Les limites à la déconstruction
Les parents présents évoquent la force de leurs limites dans la pratique, dans leur vie quotidienne avec leur enfant par rapport à la théorie, à leur idéal. Nous évoquons la force des dogmes.
L'ambivalence et le problème de la déconstruction de "l'amour" en tant que rapport stéréotypé et enfermant et du besoin d'amour en tant que lien fondateur de tous les autres.
Il y a une pression sociale très forte sur la façon "normale" d'"élever" ses enfants. Et les milieux anti-autoriaires ne sont pas à l'abris du désir de "faire" des enfants de futurs adultes "parfaits" (de bons rebelles et surtout pas de bons citoyens, haaa les cris d'horreurs quand quelqu'une annonce que ses enfants sont cadres-sup ou veulent entrer au G.I.G.N...)
Un des freins à la déconstruction dans la relation parent/enfant est la recherche de simplicité, de ne pas se prendre la tête, de faire ce qui fonctionne, c'est à dire par exemple que c'est plus simple que la mère cède à la demande de son enfant plutôt qu'elle négocie avec lui pour qu'il accepte que cela soit quelqu'un d'autre qui le fasse à ce moment-là.
Perspective proposée
La perspective proposée est de travailler collectivement la vie avec les enfants dans une prochaine rencontre comme celle ci, c'est à dire d'essayer de faire ce que nous n'avons pas réussi à faire cette semaine. Par exemple : dans les réunions, dans les moments où un enfant a besoin d'attention, ou dérange en jouant car il parle fort, etc., que ça ne soit pas systématiquement les parents qui s'en occupent mais que cela soit porté et élaboré par et dans le groupe. En veillant a respecter des réponses différenciées et en évitant des positions collectives uniformes (violences des rapports conflictuels et amplification des clivages lorsqu'on s'appuie sur son groupe ou son clan pour défendre son point de vue ). Il serait aussi intéressant de sortir ces questions du cercle familial ou des spécialistes de l'enfance...